L'Ecole de Tarot des Mémoires de l'Âme
Eros et Psyché
Le tourment enduré par l'âme dans sa relation avec l'éros est l'un des thèmes dominants de la légende d'Eros et Psyché.
Le tourment enduré par l'âme dans sa relation avec l'éros est l'un des thèmes dominants de la légende d'Eros et Psyché.
L'Amour se meut en effet dans plusieurs directions car ce n'est pas seulement le "moi" qui aime mais d'autres figures, d'autres images, d'autres rêves qui animent l'être, le désirent et le rendent désirant. Aussi, la souffrance de l'âme semble-t-elle inhérente à toute relation intime et quelles que soient les circonstances, l'amour dispose des êtres comme si une nécessité mythique à reproduire la légende d'Eros et Psyché était écrite.
Etant convenu que dans l'amour délicieux du début l'anxiété est inscrite, quel pourrait-être le résultat de ces tortures (trahison, abandon, déni) ? Et d'ailleurs sur quoi se porte la torture ? En quoi consiste-t-elle ?
Le psychisme, souffrant du mal d'amour, converti l'âme de l'être humain en psyché. Si Éros, mis à la torture par son principe même le feu, brûle l'autre, il brûle seul lorsqu'il est séparé de Psyché, ou lorsqu'il est dénué de réflexion des profondeurs. Quant à Psyché, séparée d'Eros, sans amour, inconsolable, elle se livre aux travaux de survie, mais sans espoir et sans énergie. Leur séparation est expérimentée comme une coupure ; pendant que d'un côté Eros brûle de tous ses feux, la psyché de l'autre rumine ses tourments et accomplit ses corvées.
Avant que la réunion d'Eros et Psyché soit possible, Psyché doit passer par la nuit de l'âme où elle sera déchirée entre deux sentiments contradictoires : celui du « possible » dont elle est ontologiquement porteuse et le sentiment de culpabilité inhérent à la séparation et la fin. Ce supplice (car ni la fin, ni le « stop» ne sont concevables pour l'énergie féminine), s'étend jusqu'à ce que le travail de l'âme (les corvées de Psyché), par son aboutissement, réunisse Psyché à Eros transformé. Eros qui de son côté, semble avoir du régresser jusqu'à un état de veille et d'agitation enfiévrée où, subissant la domination de sa mère, accède à la conscience psychique par le manque que cette régression lui apporte. Se confirme ici que la trahison conduit toujours à une série d'épreuves rédemptrices.
Et c'est alors qu'advient l'union d'Eros et de Psyché, une union pour laquelle la bénédiction des dieux est nécessaire. En effet, réaliser que nous avons perdu l'amour primordial non seulement par la trahison et la séparation d'avec Eros, mais aussi par notre mauvaise union avec lui est donc nécessare pour que s'accomplisse l'union légitime entre le psychisme et le principe créateur. D'où les servitudes, les servilités, les douleurs, les tristesses, les regrets auxquels s'abreuve l'être...
La souffrance en ce mythe est de l'ordre de l'initiation. Il inspire, face aux tourments de l'amour, un nouvel esprit d'affirmation et d'encouragement. Car, quelque que soit le déguisement revêtu, c'est Eros qui est en cause, sa puissance créatrice cherchant à s'unir à Psyché s'éveillant aux mouvements de la vie. Toutes ces complications, tous ces tourments sont au cœur de la discipline psychologique et nécessaires au développement de l'éros et de l'Amour.
Eros se remémorera toujours ses origines dans le chaos, le recherchant pour s'y revivifier, recréant sans cesse les nuits obscures et les systèmes confus dans lesquels il peut se complaire, renaîssant dans les conflits passionnels, les affres de la jalousie, les crises de colère et les agitations de l'âme.
Né du chaos, Eros signifie que la créativité peut naître en chaque moment chaotique. Il est alors possible de reconnaître qu'Eros et la psyché ne sont pas simplement des personnages de contes ou des images de grand archétype, mais les deux pôles de tout développement psychique l'un à l'autre nécessaire. C'est en expérimentant psychologiquement un événement que le lien avec lui se ressent ; par les sentiments et les désirs, conscience advient que se joue quelque chose d'important pour nôtre âme.
Que serait la vie sans épreuves ? Une interrogation flegmatique et à l'élan vital dénué de force puisque dénué de l'effervescence de l'amour. Alors que dans chacun de nos problèmes un amour inconnu se trouve caché puisque, invisible, l'Amour ne se distingue que par ses effets.
PSYCHE
(du grec psukhê - âme)
Psyché est une princesse mortelle dont la beauté chantée d'est en ouest et du nord au sud rend jalouse Aphrodite, elle-même déesse de la Beauté. Celle-ci n'aura de cesse de la faire disparaitre, utilisant même son propre fils Eros dans l'édification de son complot. Las ! Eros se pique avec l'une de ses propres flèches et tombe amoureux de la belle Psyché qu'il épouse. Une contrainte cependant, Psyché ne doit jamais tenter de voir son visage. Profondément déconcertée par les conseils fielleux de ses deux sœurs jalouses, Psyché transgresse cet ordre et contemple son mari endormi à la lumière d'une lampe à huile. Devant la sublime beauté de l'Amour Psyché sursaute, une goutte d'huile tombe sur l'épaule d'Eros qui se réveille et s'envole alors que Psyché tente de s'accrocher en vain à ses pieds. L'Amour s'est enfui laissant Psyché inconsolable. Désespérée, alors qu'elle tente de se noyer dans le Styx le dieu Pan la sauve. Psyché traversera alors une longue suite d'épreuves que lui impose Aphrodite, représentant la traversée des « nuits de l'âme » à la recherche du Désir et de l'Amour. Durant ce temps, Eros s'est réfugié chez sa mère Aphrodite qui, furieuse d'être ainsi trahie, lui intime de rester reclus. C'est à l'issue d'un temps d'épreuve qu'Eros guéri et libre de la possession maternelle, sauvera à nouveau Psyché, demandeant à Zeus de la rendre immortelle. Requête accordée par Zeus se plaisant à imaginer qu'Eros assagi ne sèmera plus la discorde chez les couples tant sur terre que dans l'Olympe ! De l'union d'Eros et de Psyché naqit Volupté.En psychologie analytique (James Hillman a magnifiquement exploré ce sujet), la psyché est une théorie qui désigne l'ensemble des manifestations conscientes et inconscientes de la personnalité d'un individu. Mais L'âme psychique ou Psyché est surtout ce qui transforme les événements en expérience. Elle se définie comme une perspective plutôt qu'une substance, un point de vue sur les choses plutôt qu'une chose.
Psyché n'a pas besoin d'être libérée de ses symptômes, elle n'a pas besoin que la vie soit vécue parfaitement. Elle recherche autre chose qu'une existence hygiénique, des relations fructueuses et des programmes de vie. Ce dont l'âme a ardemment besoin, ce dont elle se meurt, c'est de faire l'expérience du monde (se présentant à nous comme un être vivant) tel qu'il s'offre à elle dans l'expérience de la beauté qui, à l'image de Dieu, est toujours simple. Psyché, par son inclination naturelle à communiquer dans l'Amour, est ce mode par lequel se reconnaît la nature symbolique de toute réalité.
Si l'âme s'épanouit lorsque le facteur divin est reconnu dans l'entreprise humaine qui se présente, c'est que son désir est grand de s'unir avec sa matrice, elle-même l'Âme de l'univers ou anima mundi; un sens esthétique vital et sensible est le moyen par lequel l'âme humaine accomplit cette union. Aussi, l'âme possèdant une véritable propension à psychologiser, nous ne pouvons rien faire pour elle si nous ne la reconnaissons pas en tant que nature intérieure, si nous ne souvenons pas qu'elle a une imagination, une réflexion et des intentions psychiques qui lui sont propres.
Dénuée de psychologie et de dialogue avec les archétypes, la vie dans laquelle la psyché n'est pas à la poursuite de l'éros et de sa beauté, se réduit à regarder le monde pour y voir des classifications scientifiques, des produits ou des nouvelles ressources pour l'appétit du consommateur, restant aveugle aux choses dans leur forme sensible et unique.
Dans le mythe d'Eros et Psyché, l'âme dans un premier temps, encore sous l'influence de la matrice et de ses structures inconscientes, ne reconnait pas l'Amour indifférencié du Désir, lui-même objet phallique de sa mère (ou inconscient collectif). Sans désir, sans beauté, sans transcendance l'âme se meurt, l'âme souffre, l'âme accomplit ses tâches dans une mécanique désespérée. C'est donc au prix d'un parcours différenciant et éprouvant pour Psyché mais également pour Eros, que l'union entre l'âme spirituelle contenue en la matière et l'énergie divine peut se réaliser, ouvrant à l'humain le goût de vivre avec Volupté.
Eros
(L'arcane VI - L'Amoureux)
(L'arcane VI - L'Amoureux)
Au banquet fêtant la naissance d'Aphrodite, se trouvait Poros (qui désigne le passage, la route, le gué, la voie, ethymogie issue de la racine indo-européenne PER indiquant un « mouvement vers », « avancer », « entrer dans », « délimiter avec secondairement l'idée d'épreuve »). A l'issue du dîner, Pénia (personnifiant la pauvreté, le manque, le vide, la vacuité, la matière brute et le manque d'information, la privation de forme, l'absence de détermination) s'approcha de Poros endormi et profitant de son sommeil,s'unit à lui. De là naquit Éros.
« Il est toujours pauvre, et loin d'être délicat et beau comme le croient la plupart, il est rude au contraire, il est dur, il va pieds nus, il est sans gîte, il couche toujours par terre, sur la dure, il dort à la belle étoile près des portes et sur les chemins et le besoin l'accompagne toujours.(...) Il tient de sa mère, et l'indigence est son éternelle compagne. D'un autre côté, suivant le naturel de son père, il est toujours à la piste de ce qui est beau et bon (...); habile sorcier, magicien et sophiste. Dans la même journée, tantôt il est florissant et plein de vie et dans l'abondance ; tantôt il meurt, puis renaît, grâce au naturel qu'il tient de son père. Ce qu'il acquiert lui échappe sans cesse, de sorte qu'il n'est jamais ni dans l'indigence ni dans l'opulence. »
Platon nous propose ici une très inspirante description du désir et de sa manifestation dans la psyché. Eros, classiquement confronté à Thanatos et à la discorde, représente l'affinité universelle entre les êtres et le besoin impérieux de rapprochement, toujours en quête de son objet de désir, lequel entre en fonction par rapport au manque. Se situant entre la dimension du manque à être (fonction structurante pour le désir, le savoir-faire ou le savoir-être), entre la connaissance et l'ignorance, entre les dieux et les hommes par l'interprétation des désirs de ces derniers, il en est ainsi du phallus imaginaire, qui dans un premier temps médiatise la relation de l'enfant à la mère, via la castration, c'est-à-dire le renoncement. L'absence de la mère éveille l'imaginaire de l'enfant qui cherche à combler le manque générateur d'anxiété. L'amour se vit à travers l'imagination, domaine de Psyché, celui-ci se trompe souvent car abusé comme un enfant innocent. L'essence de notre expérience en cette vie n'est elle pas la différentiation de l'energie du Désir de ses attachements afin qu'Eros soit présent dans l'avec au moment de la mort ? Odyssée en une terre en friche où l'effraction du numineux et la rencontre avec le Dieu Pan ne pourra être évincée...